J'en ai rêvé et je l'ai fait.
Il suffisait d'entraîner avec soi des passionné(e)s avides de savoir. Et Saint-George était là par l'entremise d'un soleil radieux, tellement incertain les jours précédents.
On ne devrait jamais avoir de bonnes idées car elles risquent de se réaliser! Ainsi d'une visite sur les pas du chevalier dans un Paris du 18ème siècle.
Nous débutâmes, en ce soleil endimanché de légèreté, notre pérégrinatio sancti georgio place de l'Hôtel de ville 2 heures après midi en tentant de nous faufiler parmi badauds et carrioles à moteurs, nous engouffrant dans la rue des Archives. Nous fîmes une halte au 24, devant l'église des Billettes qui, outre sont cloitre, accueille le siège de l'association "Le concert de monsieur de Saint-George". (Rendons hommage à Alain Guédé d'avoir été de ceux qui ont milité et obtenu une rue du chevalier de Saint-George dans Paris)
Quelques pas plus loin, nous voilà dans la cour des archives nationales, autrement dit l'hôtel de Rohan-Soubise en lequel Saint-George dirigea le Concert des Amateurs, une des plus importantes formations musicales de ce temps. Le temps de rappeler cet épisode, et nos oreilles commencèrent à percevoir quelques trilles... venues d'une des arcades de la cour: ô surprise! Le Quatuor Antarès, par une magie (un peu commandée) nous fît entendre des compositions de Joseph. Ce petit concert fut l'occasion de faire résonner la musique de Saint-George dans un des lieux où il a fait sonner son violon. C'était le moindre des hommages à offrir à la postérité.
Nous partîmes à nouveau de bon chemin par la rue Rambuteau, passâmes devant le centre G. Pompidou, glissâmes par les jardins des Halles jusqu'à l'église Saint-Eustache. Ici, évocation fut faite de l'opéra Ernestine donné en présence de Marie-Antoinette le 19 juillet 1777 sur un livret de Pierre Choderlos de Laclos et une musique de Saint-George. Mais l'histoire d'Ernestine est tirée du roman éponyme de Marie-Jeanne Ricoboni écrit en 1763. Et Madame Ricoboni fut baptisée et est enterrée à Saint-Eustache.
Adepte des hasards objectifs et des coïncidences, à la manière d'André Breton (qui est aussi le nom d'une des allées empruntées dans ces jardins des Halles), j'évoquai le poête, et voilà que LA rencontre eut lieu, surréaliste et réelle, surréelle et réaliste: ce clown s'écria en me voyant: "Joseph? Saint-George? Oh bah si j'mattendais! et s'éloignant guillerettement "Joseph, c'est Joseph, c'est Saint-George..."
Passage par la bourse et la "tour de Catherine de Médicis". Evocation du l'édit de Nantes et du protestantisme et sa révocation en 1685, la même année que la promulgation du "code noir"...
Après quelques pas rue du Louvre, nous bifurquâmes rue Saint-Honoré et nous retrouvâmes nez à nez face à l'Oratoire, temple protestant important mais ce qui nous intéressa ici c'est le numéro 152 en face de l'Oratoire. C'est là que Saint-George devint le dieu des armes sous la houlette de Texier La Bouëssière qui y tenait sa salle d'arme.
En deux enjambées, nous fûmes derrière le ministère de la culture en passant par la rue Monstesqieu, la place de Valois et nous accédâmes au Palais Royal loti au 18ème siècle par un proche de Joseph: le duc d'Orléans. Occasion pour nous de s'arrêter à l'arcade n°18, lieu d'habitation du chevalier dans les années 1780. (ici j'aurais voulu y proposer une démonstration d'escrime, mais cela est soumis à une autorisation préalable contraignante)
Au sortir du Palais Royal rue Montpensier, il fut bon de rappeler le théâtre Montpensier en lequel s'illustra Saint-George, théâtre devenu aujourd'hui Théâtre du Palais Royal.
Clopin-clopant, nos pas nous menèrent à la pyramide du Louvre, et nous fîmes halte quelques instants pour repartir de plus belle rive gauche en passant par le pont des Arts.
Après l'Institut de France, nous sillonnâmes en ces ruelles hautement fréquentées par Joseph dans ce faubourg et quartier Saint-Germain: rue Mazarine, rue Dauphine, rue Guénégaud dans laquelle séjourna Notre héros, "face la monnaie" pour seule indication, rue Christine, rue de Savoie et rue Saint-André-des-Arts.
Halte là! Aujourd'hui, à l'angle de la rue de l'Éperon et Saint-André-des-Arts se trouve le lycée Fénelon. Mais ici se trouvait l'hôtel particulier dans lequel Georges Bologne, Nanon et Joseph vécurent au sortir du territoire de la Guadeloupe près de 10 ans. Toute la prime jeunesse du chevalier de Saint-George est là. C'est, somme toute, le berceau de Joseph à Paris. C'est là que la vie parisienne de Saint-George a débuté.
Du début, un seul pas nous fit franchir la fin: la Révolution Française que nous abordâmes dans le passage de l'ancienne comédie (cours du commerce St André), mieux en prenant le temps d'un bon chocolat au Procope, lieu révolutionnaire s'il en est. Premier café de Paris dans lequel se réunissaient les faiseurs de révolte avant que cela ne prît mauvaise tournure et que certaines têtes ne tombassent par trop de zèle. Nous ne perdîmes pas la nôtre, au contraire elle fut remplie de la joie et du plaisir de partager une histoire, et quelle histoire: celle du chevalier de Saint-George.
Joseph Bologne chevalier de Saint-George (Guadeloupe 25 décembre 1745, Paris 10 juin 1799)